Notre société actuelle s’organise en flux tendus.
L’année qui vient de passer l’a bien mis en évidence, même aux yeux de ceux qui ne sont pas accoutumés des logiques économiques. L’activité de la planète entière a été bloquée quand la Chine s’est confinée, nos hôpitaux ont très vite été saturés, etc…
Notre économie, mondialisée, s’est construite depuis 40 ans sur cette logique des « flux tendus » : le fameux « 0 stock ». Pour des raisons économiques évidentes, l’idée est de limiter au maximum les stocks de matières premières avant de produire des produits finis ; limiter les stocks de produits finis et assurer en contrepartie une réactivité optimale en production pour pouvoir fournir au plus vite pour répondre à la demande…Tout a été optimisé à l’extrême en terme de flux. Cette logique a ses limites, comme on l’observe aujourd’hui ; mais elle a permis d’immenses économies : économies de produits, de pièces détachées, de matières, économies d’espaces de stockage.
Alors pourquoi ne sommes-nous pas capables d’appliquer les bons côtés de cette logique de flux tendus à la gestion des ressources naturelles et aux énergies ?
Pour être plus clair et plus concret :
- pourquoi gaspillons-nous encore autant d’énergie ? Electricité, carburants, parce que nous laissons trop de choses allumées sans raison, que les moteurs tournent alors que ça n’est pas nécessaire…
- Pourquoi gaspillons-nous autant de ressources naturelles au travers de notre sur-consommation ? papier, cartons, eau, gobelets, plastiques d’emballage, de transport…mais aussi nourriture !
- Pourquoi gaspillons-nous autant de ressources naturelles en jetant « mécaniquement » : il faut bien avoir en tête que tout ce qui est jeté au « tout venant » est enfoui ou brûlé, sans aucune chance qu’une pièce détachée, qu’une matière, une terre rare contenue dans cet objet jeté puisse être recyclée ou remise dans le circuit.
- Pourquoi quand un objet est en fin de vie (la notion de « fin de vie » étant, en plus, extrêmement variable d’une personne à l’autre), nous n’avons pas le réflexe de ne jeter « QUE » ce qui n’est vraiment plus utilisable (et probablement même pas dans une filière de recyclage, mais mécaniquement au « tout venant ») ?
Un exemple très concret : mon dernier vélo est arrivé « en fin de vie » (élément du cadre portant le dérailleur cassé, roue voilée…). Même si j’avais prévu de l’amener à la déchetterie (synonyme de démantèlement puis recyclage), je me suis surpris un instant à ne pas chercher à récupérer tout ce qui pouvait encore servir :
- tous les accessoires encore en très bon état : freins, porte-bagage, pare-boues, sonnette, feux…
- même le vélo nu ! je me suis finalement dit qu’il serait mieux de le donner à un atelier de réparation de vélos qui saurait forcément en faire quelque chose
Pour poursuivre sur cette idée que tout peut « toujours » servir, petit partage d’expérience. Quand j’étais entrepreneur dans l’économie circulaire, nous travaillions avec des matériauthèques. C’est quoi une matériauthèque ? C’est une recyclerie…mais pour les produits semi-finis ou les matières premières. En gros, on y trouve : du fil, des morceaux de bois, des bobines de laine, des tissus, des boutons, mais aussi des pailles, des formes en polystyrène ou en tout autre échantillons de n’importe quel matériau…tout et n’importe quoi, en somme. On pourrait se dire : « qui va acheter cela ? » Et bien beaucoup de monde, en fait ! Une matériauthèque avec qui nous travaillions avait même de nombreux clients orthophonistes. Ils leur commandaient des boites avec pleins d’objets différents à l’intérieur, pour aider les enfants à s’exprimer. C’est d’ailleurs le principe des boites MONTESSORI.
On a tous ce biais cognitif de penser que quelque chose qu’on est parti.e pour jeter ne servirait à rien ni personne
Comme quoi, on a tous ce biais cognitif de penser que quelque chose qu’on est parti.e pour jeter ne servirait à rien ni personne : c’est totalement faux ! C’est même impressionnant de voir tout ce qu’on peut récupérer…et qui finit par être racheté ou utilisé par quelqu’un d’autre, souvent pour une utilisation qu’on aurait jamais imaginée.
Vous allez me dire : « Ben oui ! Mais ça va pas du tout dans le sens des flux tendus tout cela ! Cela crée beaucoup de stocks, au contraire ! ». C’est vrai ! Mais sur l’ensemble du cycle de vie du produit, ça reste bien moins coûteux (économiquement et écologiquement) que de devoir reproduire cet objet, de lui faire refaire toute la chaîne logistique.
Et vous, dans le cadre de votre activité professionnelle, avez-vous en tête des produits ou consommables que vous sur-consommer ? Des matières que vous pourriez réutiliser ou transmettre à une autre structure plutôt que de les jeter ?
Prendre le réflexe de se poser la question, c’est s’assurer de faire des économies, voire de trouver de nouvelles sources de revenus. Et c’est écologique ! En faisant cela, vous faites de l’économie circulaire…sans le savoir !